- Accueil
- > Archives pour novembre 2014
30 novembre, 2014
29 novembre, 2014
Top 3 de la semaine
27 novembre, 2014
L’usage des outils radioactifs dans l’industrie inquiète l’ASN
A l’occasion de l’audition parlementaire, lundi, sur le survol des centrales nucléaires par des drones, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et son expert technique, l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), ont tiré la sonnette d’alarme sur un autre sujet « préoccupant, et qui n’a pas trouvé de réponse » : la sécurité des « sources radioactives », ces matériaux irradiés utilisés notamment dans l’industrie.
« Ce sujet est orphelin, il serait relativement urgent qu’il trouve enfin une base législative et des services pour s’en occuper », a lancé Pierre-Franck Chevet, président de l’Autorité de sûreté nucléaire. « Nous avons un trou dans la raquette nationale. Il n’est pas normal que ce sujet ne soit pas traité après plusieurs années », a renchéri le directeur général de l’IRSN, Jacques Repussard, indiquant avoir remis un rapport classé secret défense sur le sujet au Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) il y a déjà plusieurs années, resté sans suite.
4.000 sources jugées dangereuses
Selon l’IRSN, 40.000 sources radioactives sont actuellement en circulation en France. Initialement irradiés dans des réacteurs de recherche ou dans des cyclotrons, ces matériaux sont destinés aux usages médicaux (médecine nucléaire, radiographies…), mais aussi, pour une large part, industriels. Pour contrôler la qualité de travaux sur des chantiers de construction, des entreprises comme Bureau Veritas, SGS ou Apave, mais aussi les services de contrôle qualité d’entreprises, procèdent ainsi à des tirs gammagraphiques permettant de traverser les métaux, notamment pour vérifier les soudures.
Des registres permettent de tracer ces objets, de leur fabrication jusqu’à leur utilisation, et de contrôler les enjeux de radioprotection. « L’ASN est en charge de contrôler la radioprotection, mais ce qui n’est pas réglementé, c’est la protection des objets contre des fins malveillantes », explique Jean-Luc Lachaume, directeur général adjoint de l’ASN. Or 10 % des sources, soit 4.000 objets, sont considérées comme potentiellement « dangereuses » par l’IRSN en cas de malveillance -par exemple de vol. Les plus sensibles sont ainsi les sources utilisées dans l’industrie, parce qu’elles sont à la fois mobiles – car transportées de chantier en chantier – et de taille réduite (de quelques centimètres à quelques dizaines de centimètres).
L’ASN et l’IRSN ont déjà fait leurs propositions pour renforcer leur sécurité : géolocalisation obligatoire, sécurisation des pièces de stockage et restrictions quant à leur accès. Une vigilance accrue sur le parcours des personnes utilisant ces sources, notamment en matière d’antécédents judiciaires, est aussi prônée. Mais ces pistes attendent toujours un projet de loi susceptible de les accueillir. Et une organisation administrative pour les mettre en oeuvre.
V.Le Billon
Radioprotection: le CNRS aide la PME Piercan à concevoir des gants plus efficaces
Le fabricant français de gants de protection pour le nucléaire et la pharmacie développe une collaboration avec un laboratoire du CNRS afin d’augmenter l’efficacité de ses solutions de radioprotection.
A partir de son usine de Port-en-Bessin (14), le parisien Piercan (CA 2013 : 10,8 millions d’euros ; 110 salariés) fournit des gants de protection pour les secteurs du nucléaire et de la pharmacie. Notamment des gants utilisés dans la manipulation de radio-éléments en boîtes-à-gants. Créée en 1993, cette PME souhaite à présent développer de nouveaux produits dans le domaine de la radioprotection. Les innovations attendues devront augmenter la radio-protection des gants en boîte-à-gants. Ce qui nécessite de créer de nouvelles formulations de matériaux et d’empilements de de couches répondant aux exigences spécifiques liées à chaque domaine d’utilisation en termes de caractéristiques mécaniques et de radioprotection.
Survol des centrales nucléaires par des drones: les bonnes questions du Parlement
Depuis deux mois, les survols de centrales nucléaires françaises par des drones tiennent en échec les autorités chargées de la sécurité. Tandis que Greenpeace dénonce d’importantes vulnérabilités, l’ASN appelle à repenser l’articulation sûreté-sécurité. De leur côté, les parlementaires se disent prêts à légiférer.
Lundi 24 novembre, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques (OPECST) réunissait autour de la même table politiques, spécialistes de l’aéronautique, autorités chargées de la sûreté et de la sécurité nucléaire, experts indépendants et Greenpeace. Le thème : la sécurité des centrales nucléaires face aux survols illégaux de drones. Une quinzaine de cas ont été observés depuis deux mois. A cette occasion, Greenpeace a remis un rapport sur les vulnérabilités des centrales françaises. L’ONG a choisi de ne pas le rendre public pour ne pas livrer un « mode d’emploi » pour des actes malveillants. L’audition de l’OPECST a été riche, même si plusieurs auditeurs ont regretté qu’elle ne donne aucun indice sur l’origine des vols et sur les moyens de les contrer. Pour autant, le président de l’OPECST, Jean-Yves Le Déaut, a ouvert plusieurs sujets de réflexions.
LA LÉGISLATION FRANÇAISE DES DRONES EST-ELLE ADAPTÉE ?
« Il y a beaucoup de survols illégaux dans de nombreux pays. Mais certains les contrôlent mieux que d’autres », assure Peter Van Blyenburgh, le président d’UVS international. « Les autorités américaines enquêtent par exemple sur des survols à l’aéroport JFK, qui mettent en danger les avions », confirme Patrick Oswald, le directeur commercial France air et sécurité chez Airbus Defence and Space.
La France a anticipé dès 2012 la législation sur le vol des drones. Dans le même temps, elle a constitué un tissu très riche, quasi unique en Europe, de sociétés investies dans la construction, l’assemblage, la location, l’utilisation de drones… « Un risque énorme s’est créé en France. La loi d’avril 2012 (qui réglemente le vol de drones, ndlr) a été votée vite, mais est très permissive. (…) Il manque une éducation des pilotes et des opérateurs. La quantité de dronistes qui ne connaissent pas les règles de l’air est gigantesque. Il faut que le monde des dronistes apprenne du monde aéromodéliste et du monde des drones militaires », explique Peter Van Blyenburgh. Un constat partagé. Mais « quelles que soient les réformes, il faut savoir que des modifications administratives ne vont pas régler immédiatement le problème des drones », tempère Pierre-Franck Chevet, le président de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). En ce qui concerne les centrales, le survol est interdit dans un rayon de 5 kilomètres et en dessous de 1000 mètres d’altitude.
QUELS TYPES DE DRONES SURVOLENT LES CENTRALES FRANÇAISES ?
Sur le marché mondial, les spécialistes des drones décrivent des engins très variés, allant du modèle civil de quelques kilogrammes capables de voler avec une faible autonomie à des engins militaires de plusieurs tonnes capables de parcourir plusieurs milliers de kilomètres. Dans le cas du survol des centrales françaises, John Large, expert britannique mandaté par Greenpeace, parle de drones capables de voler en autonomie (sans pilote en vue), de manière furtive (électrique) pendant une soixantaine de minutes en portant une charge utile de 10 kilogrammes. Chez les industriels, le doute plane. Francis Duruflé, le vice-président de la Fédération professionnelle du drone civil (FPDC), affirme : « Un drone capable de porter 10 kilogrammes pendant 60 minutes en mode silencieux (…), de parcourir 5 ou 10 kilomètres, puis de venir se poser avec précision, c’est supérieur à ce qui se trouve sur le marché. » John Large évoque, lui, les drones employés par la BBC, capables d’emporter de lourdes caméras (d’une valeur de 15 000 euros).
Chez Greenpeace, qui réaffirme ne pas être à l’origine de ces survols, on assure que des informations sur la nature des drones sont cachées par les autorités. Yannick Rousselet, responsable nucléaire de l’ONG, déclare qu’il existe des vidéos et des photos des survols des centrales. Selon les témoignages spontanés de gendarmes et d’employés d’EDF, les drones afficheraient de très belles performances. Yannick Rousselet indique qu’il y aurait eu des survols dans des conditions climatiques très difficiles, en particulier un vent de 70 km/h. Un autre drone a parcouru près de 18 kilomètres entre deux installations dans la zone de Flamanville (Manche). Il ajoute qu’un hélicoptère militaire a suivi un drone pendant plus de 9 kilomètres. Les gendarmes, présents à l’audition, réfutent cette course-poursuite en hélicoptère et affirment que seule une voiture de gendarmerie a suivi un drone sur quelques kilomètres avant de le perdre de vue.
SONT-ILS DANGEREUX ?
Selon l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), qui étudie également la sécurité, les drones ne menacent pas le bâtiment réacteur. « Nous considérons que ces risques sont faibles,souligne son directeur, Jacques Repussard. En revanche, ces survols mettent l’accent sur une seconde préoccupation, la vulnérabilité globale du système nucléaire. Des agressions potentielles n’auraient pas nécessairement pour objectif de créer un accident nucléaire, mais peuvent déstabiliser le système électrique (en visant d’autres zones de la centrale, ndlr). » Pour John Large,« le problème n’est pas l’autonomie ou la charge utile de ces drones. C’est le moment où votre système va être attaqué ! Les installations françaises sont vulnérables à des attaques précises. Il suffit de chatouiller une centrale pour induire une instabilité. Une petite intrusion peut entraîner un mécanisme ou un processus d’autodestruction. »
QUI DOIT ÊTRE RESPONSABLE DE LA SÉCURITÉ DES INSTALLATIONS NUCLÉAIRES ?
La sécurité des installations nucléaires revient aujourd’hui entièrement à l’armée, tandis que la sûreté est confiée à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Cependant, la situation semble ne pas convenir à Pierre-Franck Chevet, le président de l’ASN : « 95 % des homologues de l’ASN dans le monde chargés de la sûreté s’occupent de la sécurité. Il y a des sujets régaliens, comme l’intervention en cas de menace, qui ne peuvent pas revenir à une autorité indépendante. Mais il y a un débat quand il s’agit d’amélioration de la sécurité par le développement de systèmes plus robustes, diversifiés, redondants… Nous appliquons alors des principes proches entre sûreté et sécurité. » Attentif à la question, Denis Baupin, député EELV de Paris, appelait le président à préciser sa pensée afin de savoir si le Parlement doit légiférer sur ce sujet à l’avenir.
Ludovic Dupin
Nucléaire: l’Europe tire les leçons de Fukushima
Les deux associations réunissant l’ensemble des autorités nucléaires européennes viennent de rendre publiques des recommandations visant à gérer un accident nucléaire de grande ampleur. Pour la première fois, il s’agit d’une approche globale, harmonisée à l’échelle de l’Europe.
La position de Herca et Wenra vise à promouvoir au niveau européen la préparation de la gestion de crise, la transmission rapide d’informations en cas d’accident et la cohérence des recommandations émises par les autorités de sûreté pour la protection des populations. Un principe essentiel est que dans l’urgence, les pays voisins, après avoir reçu les informations nécessaires, s’alignent sur les actions de protection prises par le pays où l’accident s’est produit.
Les autorités en question soulignent qu’une catastrophe nucléaire en Europe n’est pas exclue. Certes, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) en France avait déjà évoqué la réalité de cette menace, «mais c’est la première fois que ce risque est évoqué ouvertement à l’unisson», souligne Philippe Jamet, commissaire à l’ASN.
«Des mesures opérationnelles doivent être préparées»
Les organismes Herca et Wenra ont trouvé un accord sur des périmètres de protection en cas d’accident. «Des mesures opérationnelles doivent être préparées pour qu’une évacuation des populations à cinq kilomètres du lieu de la catastrophe puisse intervenir rapidement comme c’est le cas en France, poursuit Philippe Jamet, cela signifie par exemple que des moyens de transports soient disponibles dans les meilleurs délais le jour J.» Un autre périmètre, jusqu’à 20 kilomètres cette fois, a été fixé pour une mise à l’abri des populations.
«Ce dispositif de 5-20 kilomètres est le plan de première urgence; pour les accidents les plus graves, il doit pouvoir être étendu pour procéder à une évacuation jusqu’à 20 kilomètres et une mise à l’abri jusqu’à 100 kilomètres, continue Philippe Jamet. Là encore, cela implique un gros travail en amont pour que les intervenants soient rapidement opérationnels.» Dans le cadre de leurs travaux, les associations Herca et Wenra soulignent également que le cas le plus probable est celui où l’on aurait très peu d’informations sur les circonstances de la catastrophe. «Voilà pourquoi le schéma de décision implique de pouvoir répondre rapidement à trois questions cruciales: primo, y a-t-il un risque de fusion du cœur du réacteur; secundo, l’intégrité de l’enceinte de confinement de la centrale est-elle menacée; tertio, quelles sont les conditions météo à venir», explique le commissaire de l’ASN.
Toutes ces positions et ces préconisations n’engagent pour le moment que les autorités nucléaires européennes. Elles vont maintenant chacune entreprendre une concertation avec les autorités et les parties prenantes de leur pays pour la mise en œuvre de ces recommandations.