Les sangliers du Bas-Rhin ne sont pas radioactifs
En Bavière l’été dernier, des sangliers ont été interdits à la consommation en raison de leur forte contamination. Les chasseurs du Bas-Rhin ont alors procédé à des analyses : ils n’ont pas trouvé de césium 137.
Vingt-cinq ans après l’explosion de Tchernobyl et le passage du nuage radioactif sur l’Est de la France, les chasseurs alsaciens sont rassurés. Et la Crirad (Commission de recherche et d’information indépendante sur la radioactivité) est étonnée : « Les sangliers bas-rhinois ne sont pas radioactifs. »
Comment peuvent-ils l’affirmer ? Après les résultats alarmants relevés l’été dernier en Bavière, la Fédération des chasseurs du Bas-Rhin a procédé à des analyses avec le concours de la Crirad. Cet organisme indépendant reconnu a formé une quinzaine de chasseurs volontaires à l’utilisation d’un compteur Geiger. Ceux-ci ont ainsi pu tester 359 sangliers, abattus l’automne dernier en une quinzaine de sites répartis dans tout le département.
« Ces compteurs permettent de déterminer le débit de dose de césium 137, un élément radioactif à demi-vie longue qui était présent dans la région après l’explosion de Tchernobyl en 1986 », explique Roland Desbordes, président de la Crirad. Ce compteur permet de faire un premier tri : si le compteur grimpe très haut, la viande est contaminée et sa commercialisation est interdite. S’il reste à 0,11-0,13 micro-sievert, soit le rayonnement naturel du Bas-Rhin, il n’y a pas de risque sanitaire.
Résultat : les 359 mesures se situent toutes entre 0,09 et 0,14 micro sievert.
Pour confirmer ces mesures, les chasseurs ont envoyé à la Crirad trois langues de sanglier pour des analyses plus poussées. « Le césium 137 se concentre dans les muscles. La langue est un muscle et c’est un bon indicateur de sol contaminé », souligne Roland Desbordes. Résultat : « Le césium 137 n’est détecté dans aucune des trois langues. La limite de détection est de 0,17 à 0,48 becquerel par kilo de viande fraîche. Les normes européennes sont de 600 becquerels par kilo », conclut le rapport de la Crirad.
Un résultat étonnant. Parce qu’en Bavière voisine, certains des sangliers affichaient jusqu’à 1 300 Bq/kg. Parce qu’il y a une dizaine d’années, des sangliers tués dans les Vosges, du côté lorrain, affichaient 2 000 Bq/kg. Parce que la radioactivité des bolets et chanterelles envoyés chaque année par l’ONF et la Ville de Strasbourg à la Crirad n’est pas nulle : « Elle décroît lentement mais se situe encore non loin de 100 Bq/kg. Un niveau qui n’est pas normal mais qui ne présente pas de risques pour la santé. Selon les chasseurs, le sanglier mange plus de vers de terre que de champignons et l’on n’a pas étudié la contamination des vers de terre. »
La Crirad a demandé aux chasseurs s’ils ne nourrissaient pas le gibier au maïs. « Ils ont assuré qu’ils n’en mangent qu’en automne dans les champs. On peut en conclure que les mesures ont été faites sur des animaux sauvages. »
Peut-on en déduire que les sangliers du Haut-Rhin sont aussi épargnés par la radioactivité ? « En 1988, à la demande de la Région Alsace, nous avions dressé les premières cartes françaises indépendantes de présence de césium 137. Il apparaissait de grandes différences de contamination à des distances très courtes parce qu’après l’explosion, il y a eu des orages localisés. Il est impossible de faire corréler les résultats d’alors avec ceux des sangliers de 2010 », dit la Crirad. « Les sangliers commercialisés en circuit long font l’objet de contrôles par les services vétérinaires qui n’ont jamais rien relevé », assure la Fédération des chasseurs du Haut-Rhin.
Elisabeth Schulthess